alors là

La peinture est à la caveLe multimédia, dans l’atelier

 

Nom : Zhenjun, prénom : Du. L’artiste multimédia originaire de Shanghai, présente du 7 au 31 avril à l’espace Landowski, trois installations. Ces œuvres d’un nouveau genre, imposantes par leur taille, interactives et ludiques, interpellent le visiteur sur le rôle des médias et des moyens de communication.

 

Dans son atelier à Aubervilliers, aucun tableau, pas l’ombre d’un pinceau. Tout est dans la cave, explique Du Zhenjun avec un sourire. « Tout » a été remplacé par des ordinateurs : sur la table, dans les recoins, le multimédia règne en maître.

Du Zhenjun est passé expert dans cet art du 21e siècle. En février dernier, Nantes lui a consacré une rétrospective, Lille, capitale européenne 2004, lui a commandé une installation et la prestigieuse Conciergerie de Paris a exposé l’une de ses œuvres en 2003. Aujourd’hui, c’est à Boulogne-Billancourt qu’il sévit en présentant trois installations, Vent, Cover et enfin Perturbation, qu’il a créé tout spécialement pour l’occasion. Des œuvres qui interpellent le visiteur par leur immensité, leur caractère ludique et surtout par le message qu’elles délivrent.

Clin d’œil à une scène devenue (trop) familière ? Avec l’installation Perturbation, deux écrans projettent des images représentant des individus en train de lire, de déambuler, de fumer. Devant ces écrans, une pancarte avec un numéro de téléphone. Le visiteur peut à tout moment appeler. Il provoque alors une perturbation au sein de la scène : les personnages se mettent à chercher maladroitement leur téléphone, les toits des maisons s’écroulent, les oies s’envolent…

La deuxième installation Cover, met en garde contre la censure dans les pays démocratiques. Cette censure, apparemment inexistante, qui consiste à privilégier une information plutôt qu’une autre pour répondre aux exigences de l’audimat ou du lectorat, n’en est pas moins insidieuse. Pour la matérialiser, Du Zhenjun a conçu un immense cylindre sur lequel défilent des images projetées : une scène de guerre, un discours de George W. Bush ou encore un défilé de mode. Mais lorsque le spectateur manifeste son intérêt en s’approchant de la scène, l’image de l’artiste apparaît et cache l’information. S’engage alors un jeu de cache-cache entre le spectateur et l’image sur l’écran… symbole de notre vigilance à l’égard de l’information.

Vent, enfin, présente sur un écran de neuf mètres de long, une scène paisible. L’artiste est mis en scène lisant son journal, manipulant un fax, une imprimante, un poste de télévision. Songe tranquille d’une société médiatique. Pourtant, lorsque le visiteur s’approche, des ventilateurs se mettent en action. Le vent souffle alors entre les écrans, faisant voler papiers, journaux, feuilles et perturbe l’immuable ordre médiatique… Peut-être pour nous indiquer quelle doit être notre action sur le monde qui nous entoure.

Arrivé en France en 1991, Du Zhenjun a suivi une formation de peinture traditionnelle à l’École des beaux-arts de l’université de Shanghai. Il y enseignera durant cinq ans la calligraphie. Et puis… il choisit une autre route. Celle de la France d’abord, Plus ouverte que la Chine, celle des nouvelles technologies ensuite, Je ne me sentais pas bien dans l’art classique. Je me cherchais. En 1997, Du Zhenjun se tourne définitivement vers le multimédia. La peinture ne peut plus exprimer la vie contemporaine, comme elle le faisait à l’époque de la Renaissance par exemple, explique-t-il. Les relations humaines changent et sont marquées par l’interactivité. L’art doit lui aussi évoluer.

L’artiste pourtant, ne tombe pas dans le piège de la facilité. Les nouvelles technologies ne sont qu’un outil et l’être humain demeure l’essence de sa création. Le message qu’il délivre, simple, teinté d’humour et d’ironie n’en est que plus percutant.

 

D. de V.

 

 

 

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