Manifeste des » Pantins «
octobre 2001
Aujourd’hui, l’artiste ne mène plus l’Art. Il ne le décide plus. Ne l’habite plus.
Qui décide alors ? Qui fait l’Art aujourd’hui ? : le commissaire de Biennale fabriquant un concept d’exposition sous l’égide d’un titre porteur et collectant tout ce qui s’y rapporte ; le directeur de Centre d’Art présidant au choix de l’accueil de telle ou telle œuvre ou de tel ou tel artiste en résidence.
Les yeux qui fabriquent l’Art Contemporain aujourd’hui sont ceux des professionnels du milieu, institutionnellement formés et habilités à juger, à collecter, peser, analyser, la valeur des démarches » à la mode « . Le héros de l’activité artistique, celui qui la pense, qui la rend sensible, la fait vibrer,
l’assemble, la rend intelligible et actuelle, et la donne à lire au public, n’est plus l’artiste, mais bien le commissaire.
Et cet état de fait arrange plutôt l’artiste… qui loin de se rebeller, donne contentement à son commanditaire, à sa paternité… et se conforme à ses visions, à ses choix, à ses goûts.
Et s’il se trouve en manque, une aubaine par les temps qui courent…
subjugués par les nouvelles productions de l’ère technologique ! tant de nouvelles paternités à convoiter sous le couvert des Nouveaux Outils de Communication et des Nouveaux Médias. Communiquer technologiquement, ne plus rien dire : le fers de lance. Ce renoncement à l’identité, l’artiste l’a commencé à la fin des années 60. Le 21ème siècle lui ouvre désormais entièrement les bras. Quelle décharge ! Ne plus être en charge de l’être. Laisser labels » artistique » et » artisanal « se mélanger. Prendre les uns pour les autres. Passer incognito dedans. L’âme est vendue. Tous enfin libérés du labeur à vivre l’Etre, de la responsabilité à endosser ses propres risques.
Les » Pantins » sont de ceux-là. Nous jouons le jeu. Nous nous conformons.
Nous n’existons que par nos seules activités… rudimentaires, banales, impuissantes et sommaires. Nous ne nous distinguons par aucun état d’âme ni sentiment personnel, par aucune conviction. Nous nous plions au regard et au désir d’autrui : nous ne revendiquons ni n’avons aucune identité. Ceci est
Notre réalité sur le terrain. C’est tout ce qui nous importe. Et nous l’assumons.
Nous nous revendiquons par contre du monde entier, apatrides et de tous les
pays, dispersés, disséminés dans le global, profiteurs incongrus d’une conjoncture hautement techniciste idéale pour nous effacer et nous fondre dedans.
Nous sommes de très heureux cadavres.
Du Zhenjun